Le vilain petit canard de la TCL | |||||||||||||
En cette froide journée grise, le mercure ayant été entraîné dans une chute sans fin, me rendant vers mon lieu d'étude comme à l'accoutumée, je décidai d'emprunter les transports urbains, gracieusement mis à ma disposition, pour bénéficier, entre autre chose, d'un siège chauffé et d'un gain de temps non négligeable.
Cependant, alors que je sortais de mon immeuble, je vis passer devant moi le bus n°2613 de la ligne 23. Voyant dès lors que j'avais manqué ma " navette ", je décidai l'âme en peine de me diriger vers l'arrêt de bus contigu. Mais c'est alors que le feu tricolore, signalisation bienveillante, stoppa net l'élan de mon bus impétueux ; étant donc immobilisé pour un certain temps, je m'empressai de le rejoindre. Arrivé à sa hauteur je jetai un coup d'oeil hâtif : le feu était toujours rouge, j'allais pouvoir monter !!....
Prenant donc mon air le plus désolé et procédant à toutes les civilitudes d'usage, je frappai à la vitre de la portière avant, avec la délicatesse avisée d'un homme fautif et honteux ! Le froid cinglait mon visage et l'onglée devenait oppressante. Toc toc toc....!
Le chauffeur eut cette délicate attention de ne point me considérer et de ne point me voir. Bis répétita : toc toc toc..!!!...!!!...C'est alors que cette âme charitable, ce fervent dévoué, prêt à conduire ses proches et ses semblables vers des destinés lointaines et hasardeuses, ce médiateur urbain, ce cocher du III millénaire, cet aventurier des avenues et autres trottoirs, me regarda avec toute la bonté et l'indulgence d'un ange bienfaiteur et me rendit la politesse par cette gestuelle matutinale si chaleureuse: le non réprobateur d'un précepteur incommode, qui, par un simple regard, vous fait comprendre que vous n'êtes rien, assujetti à son bon vouloir et soumis à ses humeurs. Peut-être étais-je en proie à quelque hallucination ?, mes yeux à cette heure là pouvaient encore être embués par ce voile indélébile.
Je restai médusé, pétrifié, par ce geste aussi soudain qu'inattendu, mais voyant que la chromatique signalétique allait rompre l'enchantement, j'implorai notre sauveur de bien vouloir avoir pitié de moi et me prendre sous son sein protecteur.
Touché par ma détresse, la sensibilité étant une vertu quotidienne, notre bienfaiteur, notre serveur dévoué se mit à pester et à souffler : sa main droite, par un mouvement circulaire de bas en haut, voulut déloger les mille et unes perles agrippées à cette tignasse grisonnante et clairsemée.
Le feu passa au vert et l'autobus s'élança, me laissant pantois, sans mot dire, incapable de pouvoir effectuer le moindre mouvement bilabial.Et pourtant qu'ils sont gentils nos chauffeurs journaliers, dévoués, serviables et courtois, tout à l'image de la TCL qui redouble d'efforts pour veiller à notre confort et à notre bien être. J'aime parler avec certains chauffeurs, l'ingratitude journalière de leur profession les rend souvent bavards et amicaux.
Malgré ceci, un chauffard moustachu, sa calvitie précoce étant peut-être l'objet de son courroux, dénature et souille cette profession par son comportement pour le moins surprenant. Si le règlement prévoit que les chauffeurs de bus ne doivent en aucune mesure ouvrir leurs portes à quelques piétons retardataires, nombreux sont ceux (et je parle en connaisseur) qui transgressent cet alinéa pour permettre à deux ou trois bipèdes de ne point être trempé, congelé, retardé...faisant donc un acte de civisme exemplaire, ils entretiennent ainsi la flamme de l'espoir.
Et si notre chauve-moustachu-grisonnant, lui, par de tels procédés immoraux, engendre la haine et attise la violence, comment ne pas expliquer certaines violences quotidiennes......En ce jour du mardi 27 janvier 1998, 07.45 h à l'angle du cours de la liberté et de la préfecture....
A bon entendeur, sésame ouvre toi !!!!!!!! !!!!
Benoit Valenza